Kairos

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Il y eut un moment crucial dans l’histoire de l’Europe où la Grèce refusa d’écrire, et n’écrivit ensuite qu’à contre coeur, préférant penser sans entraves. Il y eut pourtant des systèmes à cette époque, des façons d’insister, un questionnement qui ne cessait. Mais nous étions ici avant l’accumulation du savoir, encore dans l’enfance des choses. Aujourd’hui c’est tout à fait l’inverse. Le savoir s’est accumulé, et on ne sait plus bien en distinguer la donnée, ni l’espoir, ni l’opinion.

A bien y réfléchir, quand on voit la confusion dans laquelle nous sommes plongés, sur n’importe quel objet de politique, semble manquer surtout une hygiène de la pensée. Nos raisonnements ne sont plus sains d’esprit ; ils essaient de choisir entre les faits et se débarrasser du choix comme d’un cadavre. La plus grande peur est de ne pas agir – comme si se déroulait partout et tout le jour la guerre. Le vrai courage était de peser sans cesse les circonstances et d’accepter que les plateaux penchent à l’endroit ou l’inverse, que ce soit en somme la vie comme à l’hébétude. Agir devrait être un déchirement d’incertitude.

Je parle à un nombre croissant de militants sur leurs réseaux, et leur indignation me repousse autant qu’elle m’épuise. J’ai les idées claires sur un nombre croissant de sujets. Mais je crois les hommes qui les portent, mordants sur leur bord dur, friables sur leur bord faible ; j’ai donc besoin d’une combinaison d’êtres pour en faire partie rassuré. Je ne peux donner ma confiance sur un trop long parcours, à qui me paraît humain et frère. Voilà l’étendue de mon dilemme.

Credit image : Heinrich Kuhn

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