J’ai cinquante ans ; je veux la magie et l’épars,
Les lacs au Nord de la planète dans lesquels
Boire à mains nues. Et je veux ma nation vêtue,
Souveraine parce que privée d’exil, je veux
Ma maison lentement construite, ma raison
Comme une bâche sur mes folies, tendue.
J’ai cinquante ans : la chasse des bêtes crues
Commence à peine, cul nu bandant mon arc.
Et j’ai tout l’âge du monde, en extension
Allant marquer des buts dans le purgatoire ;
D’autres autour de moi se perdent avec sagesse
Ayant joué toute leur vie sans largesse.
Puisque que j’ai cinquante ans, bordel !
Quand d’autres autour de moi se contentent !
Je veux la magie ingénue et l’épars qui féconde !
Mais le médecin ignore ma gigantesque taille,
Il mesure et me tâte, et rassemble un à un mes éclats :
Je fais du sens, j’ai une pathologie qu’on nomme.
Quand j’ai eu cinquante ans, je n’y pensais guère,
Mon pas en valait trente, mon sang coulait
Comme un fleuve inexorable : j’étais vivant.
Ma préférence était, puisqu’il faut disparaître,
D’être caché des chasseurs banals, et
Ma grande taille faisait de moi une grande cible.
Crédit image : Frans Masereel