Quand on a oublié d’éteindre son téléphone au décollage
Et que l’on chevauche ainsi dans les premieres étapes du vol
Les demi-sphères de notre présence moderne au monde
Ici posées au sol, épinglées et centrées d’antennes,
Les signaux faseyent et s’amenuisent dans un murmure.
Car il n’est pas encore prévu d’être d’astreinte au delà
D’une certaine altitude. Et donc à vitesse de croisière
On atteint une solitude de cadre moyen. Et pour peu que l’on
Pense aux mythologies qui faisaient anciennement
Office de cellules où échanger ses peurs intimes, on sait
Qu’il y eu depuis Icare des inventions, mais surtout on a divisé
Les corps en boites plus fines, ce qui n’empêche en rien
D’éventrer par le vote et par l’apathie, celle de Pandore
Dont l’espoir moderne collé au fond s’enfuit alors en premier.
La plus grande peur quand on est sanglé à sa vie coté fenêtre,
Est celle d’être inutile : c’est qu’il est possible que
Tous nos emplois soient fictifs et nos souvenirs,
Sans intérêt. Car nous sentons bien qu’il nous faudrait
Etre utiles pour ne pas se dissoudre dans ce qui vient.
Il est possible que nous disparaissions de ne pas
Etre dignes d’attention. L’objectif de se rendre notable
Ne pouvant être rempli par chacun au vu du nombre,
Le rien du monde s’ouvre en grand pour y loger le conflit.
En 2017, nous allions vers la guerre en musardant, alors que
La première étape fut celle de la stupidité de nos miroirs désespérés.

Crédit image : John William Waterhouse, « Cleopatra », 1888, oil on canvas, 65 x 57 cm