Dans le trait d’esprit et sa relation à l’inconscient, Sigmund Freud décrit une série de syllogismes allant croissant et qui s’appelle dorénavant « la logique du chaudron ». A a emprunté à B un chaudron de cuivre et après l’avoir rendu, il est mis en accusation par B parce que le chaudron présente désormais un grand trou qui le rend inutilisable. Voici sa défense : “Premièrement je n’ai absolument pas emprunté de chaudron à B ; deuxièmement le chaudron avait déjà un trou lorsque je l’ai reçu de B ; troisièmement je lui ai rendu le chaudron intact. »

Quelles sont les instances récentes de logique du chaudron ?

Par exemple : premièrement il n’y a pas eu de tentative de coup d’état le 6 janvier 2021 aux Etats Unis ; deuxièmement l’insurrection était justifiée en l’absence de considération du système pour les revendications légitimes des américains ; troisièmement ce sont les démocrates qui ont conduit un coup d’état en volant l’élection.

Ou encore : premièrement, il n’y a pas eu de massacres le 7 Octobre 2023 en Israël ; deuxièmement les massacres ont été commis par l’armée israélienne sur ses propres citoyens ; troisièmement les massacres sont une réponse légitime du peuple palestinien à l’oppression israélienne.

La logique du chaudron procède sans doute d’une volonté viscérale de se protéger d’une réalité qui met sans cesse à nu la médiocrité de chacun. Il s’agit d’un voile qu’on pose sur son esprit pour s’abstraire de la rigueur intellectuelle, sans pour autant cesser de parler, c’est à dire dans notre moment historique de bavardage généralisé, d’exister.

Les manifestants rassemblés autour de leurs chaudrons d’infamie dans les universités occidentales sont masqués afin d’éviter qu’on les reconnaisse. Ils le sont encore afin qu’on les imagine plus nombreux puisqu’on ne peut compter leurs visages. Ils le sont enfin pour dissocier de leur pauvre personne la laideur des syllogismes qui sortent de leurs bouches.

Crédit image : musée Sigmund Freud de Vienne