La trop longue permanence des choses

« Même un paysage tranquille », dit Jean Cayrol ; « même une prairie avec des vols de corbeaux, des moissons et des feux d’herbes », filme Alain Resnais ; même une route où passent les voitures et où je marche peut mener au pire. Forcés de penser à ces catastrophes répétées du mal, nous sommes dans les rues américaines où les armes pullulent, nous sommes dans les rues européennes où la terreur religieuse régulièrement se manifeste. Et aux deux endroits la moitié de la population maintenant vote pour le vide qui hurle ou s’indiffère. Rien à faire, nous sommes au milieu du gué. Hannah Arendt avait vu en la ville sacrée de Jérusalem la banalité du mal ; nous sommes monté d’un degré en nos lieux séculaires de spectaculaire diffus. Le mal se pare d’atours. C’est le paysage qui est banal, et qui le demeurera quand les hommes deviendront des chiens à nouveau, déchirant la surface à peine ordonnée de nos usages imparfaits, rendus fous par la trop longue permanence des choses qu’ils avaient bâties. 

Crédit image : THTK

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