Notre esprit

Notre esprit s’habitue dans l’enfance à la vérité, par le lait maternel et par le coin dur de la table. Le mensonge vient avec le langage, dont il procède du fait de son imperfection à décrire, puis du pouvoir qu’il donne au nombre et au pervers, à la foule et au démagogue.

La désinformation de notre temps est une forme banale du mensonge. Elle semble exponentielle mais elle est traditionnelle puisqu’elle vise à conjurer une réalité alternative : notre sens de la vérité est respecté. Quoi qu’on nous mente, tout reste vérifiable. Le menteur est notre égal : il peut perdre sa mise.

Si l’espèce s’en tenait là, le combat resterait loyal, un homme en vaudrait un autre. Mais l’espèce ne s’en tient pas là. Après qu’on a multiplié les artifices du mensonge dans le paysage, c’est le ciel qui s’enflamme : enhardis, enivrés, bientôt les mensonges sont formulés pour n’être pas crus.

Peu importe alors que la vérité existe : le but recherché par le menteur est l’abdication de l’esprit. Le menteur est du coté de la force : celle d’un gouvernement ou d’une foule. On ment d’en haut, on ment en meute, on intimide. L’économie antique du mensonge, qui rusait pour la rapine, s’efface derrière la recherche moderne d’une banqueroute de l’adversaire.

La conscience de nos jours abdique de multiples manières devant les mensonges incroyables. Elle renonce à son âme d’un deuil qui ne serait qu’une résignation. A la vérité elle abdique toujours par peur, avant toute chose.

Crédit image : Miguel Vasquez

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